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- La complexification du paysage médiatique local Le développement des sites d'information locale en France Un contexte particulier : l'érosion des ventes de la Presse quotidienne régionale - Internet, l'acteur le plus pertinent? |
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INTRODUCTION Cet été, j'ai effectué un stage au sein de l'équipe de Lyon Webstub , site d'informations locales qui s'est créé en avril 2000 à Lyon. J'ai pu alors réaliser quels étaient les enjeux du développement d'un autre support d'informations au niveau local: enjeux économiques, enjeux communicationnels, enjeux informationnels Autrement dit, avec Internet, de nouveaux acteurs se sont introduits dans un environnement clairement dominé par la presse quotidienne locale avec une volonté de se démarquer de ce média traditionnel. Il m'a semblé alors intéressant d'analyser ce passage critique, c'est-à-dire une période où des personnes sont confrontées à des choix, au niveau local. De manière générale, nous sommes confrontés actuellement à une segmentation de l'offre d'informations avec la multiplication des sites sur Internet, les chaînes de télévision sur le câble, le satellite et bientôt sur le réseau hertzien avec le numérique, des radios et des titres de presse écrite. De ce cadre nous nous focaliseront sur le support Internet au niveau local. Ce parti pris se justifie par le bouleversement particulier que connaît le paysage médiatique local en ce moment (voir ci-dessous) et par les observations que j'ai pu faire lors de mon stage cet été. Le paysage de la presse locale ne peut plus être caractérisé par un simple fait: le monopole ou le quasi-monopole d'un groupe de presse sur un territoire bien délimité. "De toute évidence, le journal régional risque de perdre sa position de quasi-monopole. En effet, les nouveaux médias l'entraînent déjà dans une concurrence sélective," a écrit Michel Mathien en 1993 en parlant de l'arrivée de la télématique . En 2000, la presse locale semble être bien dans cette "concurrence sélective". Car Internet a introduit de nouveaux acteurs, en particulier à Lyon. C'est dans cette ville qu'Alexandre Dreyfus a imaginé le concept de cityguide avec Webcity. Concept qui existait déjà aux Etats-Unis, toujours en avance dans ce domaine. En 1997, Webcity s'implante dans la capitale des Gaules et, bien soutenu financièrement, tisse sa toile sur d'autres villes de France. Actuellement, 37/8 villes sont couvertes. "Premier média-portail de proximité" , ce site constitue une référence. C'est aussi le premier à être reconnu sur le plan national. En utilisant Internet comme outil d'informations locales, Webcity a fait réagir la presse locale qui s'est sentie bousculer sur son propre territoire, plus particulièrement en zone urbaine. Ainsi, Le Télégramme de Brest créé une société SA Vivalaville au capital de 4 millions d'euros pour créer des city-guides dans toute la France. Il a commencé sur son propre territoire avec VivaBrest, VivaNantes et VivaRennes puis s'est déterritorialisé. Au projet, "couvrir 20 villes en 20 mois" avec un investissement de 300 millions de francs dans les cinq à venir . Le processus est ainsi rapidement mis en place. Le Télégramme a déjà conclu un accord avec Le Républicain Lorrain pour créer Vivametz. Autrement dit, il s'allie avec la presse traditionnelle, qui a les mêmes caractéristiques, un réseau de correspondants et une base financière, sur un autre territoire. Le jeu devient alors plus complexe. VivaLyon était annoncé pour le 20 octobre puis pour le 20 novembre et, finalement, voit le jour en décembre. Avec une "éditrice en chef", trois journalistes devraient réactualiser le site trois fois par jour. Le concurrent du Télégramme, Ouest France, a lui aussi créé son projet de réseau de cityguide, "Maville". Soulignons la présence récurrente de l'entité "ville" dans la dénomination du support. La ville devient l'unité spatiale primordiale de ces sites (nous l'étudierons dans la première partie). La Socpresse, elle, lance parisavenue.fr, alors que le projet Cityvox est à vocation européenne. Les quotidiens nationaux ne veulent pas rester à l'écart. Le Monde s'allie avec Sud-Ouest, s'appuyant ainsi sur un média local bien ancré, pour tester le modèle de ce cityguide à Toulouse. A fur et à mesure, la presse écrite prend conscience de l'ampleur du phénomène. Récemment, dix neuf titres de presse nationale et locale, dont ceux de la Socpresse (Le Progrès notamment), annoncent la création d'un réseau de cityguides destiné à couvrir trente-cinq villes . Se sentant menacé sur leur propre territoire, leur volonté est de "crédibiliser" l'information. A côté, des sites d'informations locales uniquement en ligne se développent. "Au début, en mai 1999, nous nous sommes concentrés sur Nice. Compte Tenu du très fort retour, nous avons décidé de développer cette formule au niveau national," explique Gilles d'Elia, PDG de la société ViaNice.fr . Après la création de ViaNice.fr, c'est au tour de ViaToulouse et de ViaLyon.com. La réussite n'est pas immédiatement au rendez-vous. Le site lyonnais ferme quelques mois plus tard, faute d'audience. Chacun veut se démarquer de l'autre. "Nous nous distinguons clairement de Webcity qui a dorénavant des ambitions internationales. Pour l'instant, nous misons sur un développement exclusivement national," continue le responsable de ViaNice.fr. Egalement Webstub, dont sa première version a été lancée en Alsace en novembre 1998, veut se démarquer de Webcity avec sa dénomination de "news magazine". La référence? L'Express, Le Nouvel Obs... D'autres acteurs émergent pour s'immiscer dans la brèche de portail local et de magazine en ligne. Ce sont les acteurs institutionnels. La Communauté urbaine de Lyon a relooké son site cet été pour "faire plus magazine". A côté, un groupe local des Monts du Beaujolais, réunissant 5 communautés de communes, a mis en place "www.monts-du-beaujolais.org" pour proposer aux visiteurs "de multiples possibilités d'accès à l'information". et il ne faut pas oublier, dans ce paysage local, la presse locale qui crée son site Internet pour mettre en ligne ses papiers principaux ou proposer des services comme LeProgres.fr. En fait, la presse régionale connaît une érosion de ses ventes, "notamment dans les zones de monopoles". C'est pourquoi des "hebdomadaires locaux attaquent les quotidiens dans les villes" . Sept titres ont récemment été créés dans les villes comme Marseille, Toulouse ou Grenoble. "A l'heure d'Internet, l'écrit relève dans un secteur où il n'est pas attendu," écrit Michel Delberghe. Et la ville est de nouveau l'enjeu d'affrontements. Ces hebdomadaires locaux qui sont le plus souvent implantés en zone rurale tentent de s'attaquer à la presse quotidienne en zone urbaine. Dans cette configuration, le même public est sollicité que ce soit celui de la télévision locale, d'Internet et de ces hebdomadaires. A Lyon, Lyon Capitale a justement été créé pour se démarquer du ton rédactionnel du Progrès. Au départ, le projet culturel s'est transformé en un véritable journal d'informations locales. Mais, désormais soutenu par Le Progrès, qui réalise aussi son site, la concurrence n'a plus d'être qualifié dans ce cas comme "sélective". Enfin, les télévisions nationales font des décroches locaux comme M6, qui rediffuse ses reportages sur Internet et qui vient de créer un site d'informations locales sur Lyon avec une équipe de journalistes spécifiques (M6Lyon.fr). La chaîne d'informations en continu de Canal+, I Télévision, a l'ambition d'être de couvrir toutes les régions. Et France 3 Régional revoit sa conception de la tranche horaire 12-13 heures en accentuant encore plus sur le local. En somme, le paysage local urbain, qui n'est plus l'espace du monopole traditionnel de la presse quotidienne, s'est complexifié avec l'arrivée de nouveaux acteurs, de nouveaux supports. On peut constater des transformations au niveau des acteurs, du territoire et de la médiation. Car l'information locale est devenue une véritable valeur ajoutée qu'il s'agit d'exploiter. La France est un pays urbanisé avec 80% de sa population qui vit dans une ville, l'entité principale du lieu de vie. C'est dans cet espace que se joue véritablement ce qu'on pourrait appeler de manière caricaturale "la guerre de l'information". Dans un double mouvement de globalisation et de régionalisation, les médias jouent leur carte soit au niveau international, soit au niveau local. Avec ses différents atouts, Internet constitue ou devrait constituer un acteur principal. Des études ont montré la complémentarité entre la presse écrite et sa mise en ligne, qu'Internet ne supplanterait pas les médias traditionnels. " Pour l'instant, la version électronique n'est pas du tout concurrente mais plutôt complémentaire de la version papier du journal," écrit Marino Cristina . Or, au niveau local, la concurrence a bien lieu, comme on a pu le constater ci-dessus. Il ne s'agit pas de se partager le lectorat dans son ensemble mais de s'approprier au niveau d'Internet une situation de monopole ou de quasi-monopole. Certains de ces city-guides ou "news magazine" devraient disparaître à l'exemple de Vialyon.com, qui a fermé en juin. Pour l'instant, c'est la course aux investissements. Ainsi, Vivaville, financé par Bretagne Multimédia (filiale du Télégramme de Brest), du Républicain Lorrain et de l'Est Républicain, a reçu au mois de juin une première dotation de 3 millions d'euros. Le but est d'atteindre 300 millions de francs pour recruter 80 personnes pour couvrir 15 à 18 villes . L'équipe de ViaNice.fr souhaite lever entre 20 et 30 millions de francs. Et la concurrence est rude. A Lyon entre Webcity, Webstub, Cityvox, Best of City, Le Renard, Lyon Web, Lyon People et les site officiels de la ville de Lyon et de la Communauté urbaine, il n'y a pas moins de 9 sites de services et d'informations locales. Sans oublier les sites des médias "traditionnels": Le Progrès, Lyon Capitale, M6 Lyon et les radios. Sans oublier les dépêches locales des portails nationaux comme Voila.fr et Yahoo!France. Sans oublier tous les sites de petites annonces comme hebdo69.com ou d'agenda culturel comme Le Petit Bulletin. La mise en place d'un cadre général, le bouleversement du paysage médiatique local avec l'introduction de nombreux acteurs, permet de poser une première hypothèse: la ville est l'enjeu, présent et futur, d'une vive concurrence sur Internet pour s'accaparer d'une valeur ajoutée, l'information locale. L'étude sur tout le territoire national serait trop vaste. Pour être plus précis et pertinent, l'étude portera sur une agglomération particulière: Lyon. Nous avons vu que cet espace urbain était particulièrement actif avec l'introduction de nouveaux acteurs. Le lieu étant clairement délimité, il s'agit de bien préciser l'objet de notre étude. Soit elle pourrait porter sur les sites en général, avec la proposition de contenus propres ou la mise en ligne d'un média déjà existant comme Lyon Capitale. Soit elle porterait sur les sites uniquement en ligne, qui ne vise que la stratégie Internet comme Webcity. Le premier choix aurait le mérite d'avoir une analyse exhaustive (tous les sites seraient étudiés, sans exception). Mais l'enjeu, ici, est bien d'étudier la potentialité des cityguides de concurrencer la presse régionale. Ainsi, c'est plutôt sur ces derniers (nous avons énuméré la liste ci-dessus) que s'appuiera notre étude. Il ne s'agit pas de revenir sur la question: est-ce que la mise en ligne de la presse écrite est un danger pour celle-ci? Des travaux, des ouvrages ont été publiés là-dessus. Ils ont démontré la complémentarité de ces deux médias. "Internet annonce-t-il la mort de la presse écrite?" n'est pas, en tout cas pour le moment, une question pertinente. Notre analyse consistera plutôt à réfléchir à comment les cityguides peuvent empiéter sur le territoire de la presse régionale. Quelle stratégie adoptent-ils ? Quelle est leur structure? La vision de l'information locale est-elle la même? Les journalistes travaillent-ils de la même façon? Pour quel modèle économique? Cette concurrence est-elle, en fait, réelle? En bref, un nouveau modèle médiatique local émerge-t-il? De nombreuses questions se posent et nous tenterons d'y répondre en s'appuyant donc sur la ville de Lyon et en étudiant de près les cityguides, sous oublier de les mettre en perspective avec les autres médias traditionnels. Dans le cadre d'une complexification d'un paysage médiatique local, Internet serait-il l'acteur le plus pertinent pour emporter la mise? La question peut paraître provocante mais résume bien l'enjeu actuel. En tout cas, cette problématique sera le fil directeur du mémoire. Nous sommes face à un mouvement actuel de l'environnement médiatique lyonnais: une évolution complexe et permanente. Nous avons pu apercevoir les différents faits de cette complexité en France ci-dessus. Or, au niveau global, la concentration des groupes de communication serait plutôt la tendance actuelle. Ainsi l'oligopole deviendrait plutôt la norme sur le plan mondial. Norme que connaissait la presse au niveau local. Auparavant, la presse quotidienne régionale s'était accaparé le territoire régional pour tenter d'y exercer une domination. L'exemple du Dauphiné Libéré en région Rhône-Alpes y est flagrant. Mais, depuis quelques années, cette évolution tend à s'inverser. Nous pouvons apercevoir un éclatement de l'offre de l'information. Dans le bassin genevois et la vallée du Mont-Blanc, un hebdomadaire, La Tribune du Mont-Blanc, a été créé et se place justement dans une perspective de concurrence avec le Dauphiné Libéré. Il faut bien être conscient que cette dynamique se situe dans un contexte actuel favorable à la presse avec des recettes publicitaires en hausse. Or, comment Internet intervient dans ce jeu médiatique? Cet "acteur" est-il capable de s'imposer dans un espace longtemps dominé par la PQR? Contribue-t-il au dynamisme actuel? Ainsi, d'autres questions se posent. Ce qui nous guide dans ces méandres, c'est bien le nouveau rôle des cityguides. Qui sont-ils? Nous pourrons prendre la définition que se donne un cityguide américain, HamptonRoads.com: c'est " un site qui fournit des informations sur les lieux où nous vivons avec, pour paramètres, la citoyenneté, le voisinage, la scolarité, les affaires, des cartes, des histoires, une télé, des services et beaucoup d'autres choses ". Le cityguide est un concept qui tend vers l'exhaustivité de l'information sur un territoire donné. Avec le mot "city", cet espace est urbain. Et le qualificatif "guide" vient du guide touristique, comme, par exemple en France, le guide du Routard. Il s'agit d'orienter, d'indiquer. En bref, les cityguides ont pour objectif d'offrir un service de proximité aux habitants de la ville puisqu'ils puissent se retrouver dans la complexité des informations qui circulent. C'est pourquoi nous étudierons l'espace urbain et son lien avec les nouvelles technologies de communication et d'informations pour analyser comment les cityguides se sont implantés ou s'implantent. L'environnement et le contexte étant défini, nous pourrons voir comment se présentent ces cityguides. Nous pourrons alors définir une typologie. Et, enfin, nous prendrons une loupe pour mieux comprendre le travail des acteurs dans ces cityguides. L'objet de cette recherche est nouveau ; il n'a jamais été étudié de manière rigoureuse et approfondie. Laurent Gueslin et Olivier Talles de l'IUT de journalisme de Bordeaux avait esquissé les contours du problème sur leur site . Le Centre de recherche d'information et de communication, coordonné entre autres par Denis Ruellan , réfléchit depuis plusieurs années sur le développement de ces sites d'informations avec Frank Rebillard à Lyon. Mais ces études sont récentes et le recul nécessaire pour en prendre la bonne mesure n'est pas suffisant. Là réside la première difficulté : ce manque de recul évident. Le phénomène est nouveau en France et il est difficile d'en saisir sa réelle importance. Egalement, les évolutions pour l'instant sont rapides. L'étalon-temps pour mesurer ce développement serait quasiment le mois. Des sites se créent, d'autres ferment leurs portes. Or, cette rapidité empêche des résultats stables et durables. L'analyse faite en avril ne vaut plus en septembre. Cela nécessite un ajustement permanent des hypothèses émises. Pour appuyer la recherche, il faut des matériaux. Ceux-ci ne sont pas si évidents à trouver. Ces sites d'informations locales ne veulent pas encore dévoiler, notamment, leurs chiffres d'audience. Ou ces chiffres sont " truqués ". L'audience sur Internet constitue une véritable pertinence de l'analyse. Car il est déterminant de savoir quel public touchent ces sites et combien de personnes les visitent. " On veut bien te donner les chiffres mais tu les gardes pour toi," m'a confié un jour une rédactrice d'un site. De plus, le fonctionnement de ces jeunes entreprises ne permet pas à ces acteurs de consacrer beaucoup de temps aux entretiens. Ces matériaux étant primordiaux pour la troisième partie, il faudra mélanger les entretiens semi-directifs et les questionnaires. L'entretien par courrier électronique ne sera pas non plus exclu. Enfin, cette recherche se veut limitative au niveau géographique. Elle ne concerne que Lyon, non par nombrilisme, mais par méthode. Il serait trop ambitieux de pouvoir étudier à fond le problème sur un territoire plus large. De plus, le cadre de ces sites est urbain. L'étude micro permettre d'en dégager les traits généraux tout en précisant les spécificités de la ville. DERNIERE MISE A JOUR: 16 mars 2001 Ce document est sans copy right. La seule restriction est de juste citer la source, merci. |
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