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L’espace urbain est, par définition, complexe. « Dans le système urbain, plus encore que dans tout autre, rien n’est simple, ni stable. Tout est complexe, en évolution constante, solidaire, difficile. »(18) Avec une intrication de flux de communication, l’arrivée d’un nouveau réseau peut rompre l’équilibre de ce système. Aussi, faut-il réfléchir l’intégration des nouvelles technologies de l’information et des communications (NTIC), désormais appelées technologies de l’information et des communications (TIC), à Lyon. 2.1. Lyon
et les technologies d’information et des communications
2.1.1. Les infrastructures et les compétences Lyon, comme deuxième agglomération française, constitue historiquement un carrefour, ce qui a permis le développement des échanges commerciaux et culturels. « Sa fonction de métropole européenne et sa place de carrefour de communication ont su attirer à Lyon les prestataires de services, les opérateurs, et les centres de recherche indispensables au développement de ce secteur d’activité [TIC]. »(19) A la demande de Raymond Barre, la société lyonnaise de développement des technologies de l’information, dans le cadre de Millénaire 3, a réfléchi sur ce sujet. Ces réflexions ont été suivies et validées par le comité stratégie de télécommunication (20) . Ainsi, il s’agit d’accompagner des initiatives privées et publiques. Avec le Réseau mutualisé des télécommunications (RMT), la ville de Lyon dispose, grâce à quinze opérateurs de télécommunication, de 240 kilomètres de réseaux. Dans le département du Rhône, trois principaux acteurs jouent un rôle dans le transport des données informatiques : France Télécom, NC Numéricâble et Rhône Vision Câble. Toutes ces infrastructures sont nécessaires au développement des TIC. Et la cohérence de l’installation de ces infrastructures permet une dynamique plus efficace. A elles seules, les infrastructures ne suffisent pas. Il faut également accompagner, dans le domaine des compétences, ce développement. A Lyon, le secteur des TIC représente plus de1400 sociétés et 17000 emplois (21). « L’ambition de la collectivité est de soutenir ce pôle d’expertise technique, de création, de distribution et de diffusion. » (22) Ce « pôle d’expertise » permet de soutenir et d’accompagner ce secteur d’information, autant en amont avec les fournisseurs d’accès à Internet qu’en aval avec l’équipement informatique des foyers. Dans ce sens, il s’agit d’éviter de nouvelles exclusions en favorisant l’appropriation des outils et des connaissances en créant de « nouvelles transversalités ». Par exemple, Cap Canal, la chaîne de télévision éducative diffusée sur le réseau câblé à l’attention des 30 000 enfants des écoles primaires et maternelles, permet une nouvelle pratique d’apprentissage des TIC. Le développement des bornes publiques Internet fait partie de cette action éducative. Outre l’éducation, pour pouvoir exploiter l’outil multimédia (diffusion notamment du son et de l’image), le haut-débit est un enjeu primordial pour ces city guides, car les acteurs de ces sites comptent sur une meilleure diffusion des images (animées ou non) et du son. Le décret du gouvernement (23) a instauré le dégroupage de la boucle locale et a donc mis fin au monopole de France Télécom pour « permettre le développement rapide de l’Internet à haut débit en France ». Ce décret est effectif depuis le 1er janvier 2001 mais, avec les blocages de l’opérateur historique, son application se révèle difficile. En tout cas, le territoire de l’agglomération lyonnaise est couvert par des réseaux câblés avec 300 000 prises. Avec les faisceaux hertziens, la boucle locale radio, l’ADSL et les réseaux câblés, ces expérimentations sont la matrice d’une dynamique de développement pour les TIC. 2.1.2. La localisation des city guides dans l’espace urbain Dans cet environnement, ce n’est alors pas par hasard si France Télécom ou M6 choisisse la ville de Lyon pour expérimenter leur modèle de city guide. L’intégration de ces différents sites dans l’espace urbain en est-elle alors favorisée ? Nous pouvons d’abord constater une concentration des locaux de ces acteurs sur la presqu’île, cœur historique de la ville de Lyon. « Mon objectif, c’était la presqu’île », indique l’éditrice online de Vivalyon. Pourquoi ? Les principaux événements se déroulent dans cet espace, entre le 2ème et le 4ème arrondissement avec la présence des institutions politiques (la mairie centrale) et culturelles (l’opéra et le TNP par exemple). Cela permet alors d’être rapidement sur place. Les différents titres de presse sont présents, principalement rue de la Charité avec le Club de la presse. De ce fait, la médiation entre le territoire et ces acteurs est le premier facteur d’intégration. Il est presque un gage de crédibilité pour ces médias. La présence au centre de la ville est significative de la volonté d’être au centre des préoccupations des gens.
Intégrés à cet espace, ces nombreux city
guides tentent pour se démarquer de se différencier. Cette
différenciation fait partie du processus d’intégration au
sein des médias lyonnais.
2.2. La différenciation respective des city guides, facteur d’intégration ? (retour haut de page)
Chaque city guide suit une stratégie de différenciation pour essayer de sortir de cette « bataille ». « Nous sommes dans un contexte où plusieurs sites sont en compétition pour s’attirer un maximum d’internautes, et un maximum de revenus ; et comme dans toute compétition, sportive par exemple, il y a des gagnants et des perdants », analyse Cory Chaplin, le responsable du site Lyon Poche. Isabelle Pailliard note également que « se pose la question de la cohabitation de la PQR avec la multiplicité des supports de l’information et de communication qui tendent à remettre en cause le monopole qu’elle détient le plus souvent » (24). Avec le développement croissant de ces sites d’informations locales, il y a en effet une confrontation. « Déjà nombreux à Lyon, les city-guides s’apprêtent à se livrer une bataille sans merci avec l’arrivée du portail de Voila de France Télécom dans quelques semaines », écrit Sylvain Der-Sarkissian (25) . Europe 1 parle également de « théâtre d’affrontement » (26), alors que le site du Toscin pense que « la guerre des « cityguides » est déclarée »(27) . En fait, selon un ancien responsable technique d’un city guide parisien, « le city-guide n’est juste qu’une plate forme de préparation de nouveaux services financiers ». L’enjeu de cette bataille serait-il uniquement financier ? En tout cas, pour un internaute lyonnais, « une dizaine de « cityguides » sur Lyon même pour un terrain d’expérimentation, c’est au moins huit de trop ! » 2.2.2. La différenciation à tout prix ? Dans ce contexte, comment ces différents city guides s’affrontent-ils ? Comment testent-ils leurs modèles ? Sur un terrain d’expérimentation (28), chacun se différencie ou plutôt tente de se différencier. Lyon Webstub se dit, ainsi, être le premier à offrir sur Internet un magazine de proximité. Selon les initiateurs de ce projet, cela « représente une forte valeur ajoutée ». De ce fait, ils considèrent qu’ils n’ont aucune « concurrence réelle » même s’ils sont conscients qu’il existe, du point de vue des annonceurs, une concurrence. Or, être le premier réseau dans un domaine constitue pour eux une « carte maîtresse ». Dans le secteur d’information, Natacha Mouriquand s’attache à appuyer le professionnalisme de son équipe : « ici, chacun a sa carte de presse ». Autrement dit, les journalistes de ce city guide sont reconnus par la profession, ce qui leur permet d’éviter les critiques d’ « amateurisme ». En effet, dans la majorité des cas, les rédacteurs n’ont pas leur carte de presse. Sont-ils alors journalistes ? Quelle est la crédibilité de l’information ? « La libéralisation des télécommunications au niveau mondial renforce donc la liberté d’expression mais aussi celle de la désinformation », pense Charles de Laubier (29). Le statut du journaliste professionnel est régi par la loi du 20 mars 1935 avec des conditions précises (30) . Le problème ne se pose pas tant au niveau de l’acteur qu’au niveau de l’entreprise qui n’est pas une entreprise de presse. Ainsi, par exemple, Webstub est régi par une agence de communication alors que Vivalyon est soutenu par la PQR. Natacha Mouriquand reconnaît que le fait d’appartenir à un groupe de presse « facilite les choses ». Mais la carte de journaliste est-elle déterminante pour le travail de ces différents rédacteurs ? « La carte professionnelle joue, sur ce point, un rôle essentiel car, plus que tout autre instrument d’exclusion, elle fonctionne comme un attribut symbolique capable de déterminer des frontières là où le législateur ne leur aurait pas imaginées », répond Denis Ruellan (31). D’autres facteurs de différenciation sont utilisés par les city guides. L’enjeu, dans le réseau des réseaux, est d’être le pionnier dans un secteur pour être en avance sur les autres. Webcity, en tant qu’acteur historique français dans ce domaine, pense avoir cette avance. Selon le rédacteur en chef, ils ont deux ans d’avance sur ses concurrents et il s’agit, actuellement, de la garder. « Encore une fois, le temps joue pour nous », affirme-t-il. Dans cette « bataille », chaque acteur veut mettre le maximum d’atouts de son côté et que ceux-ci soient visibles par les concurrents et surtout par les internautes. Comme nous l’avons pu voir au-dessus, Webstub se targue d’être le premier « news magazine régional ». Cityvox s’appuie sur « l’interactivité », avec la participation active des internautes à l’élaboration du city guide. « Nous sommes les premiers à avoir fait cela », proclame le responsable. Les acteurs sont conscients de cette concurrence et de l’avenir : tous ces city guides ne pourront coexister dans ce seul espace. « On va se bouffer le nez, il va y avoir des morts », n’hésite pas à dire un rédacteur. Le démarcage se révèle alors primordial pour permettre une reconnaissance des internautes. Mise à part le budget de communication de Voila et de Webcity, très peu de city guides investissent dans la publicité. La taille du marché est encore petite. Nous pouvons raisonnablement estimer le nombre d’internautes à 50 000. De ce fait, l’audience n’est pas encore un des premiers enjeux de ces sites d’information locale, sauf pour les annonceurs. Les acteurs doivent avant tout s’intégrer et dans le réseau numérique et dans le réseau urbain, avec la reconnaissance des institutions politiques, culturelles et médiatiques. Après cette phase d’implantation – certains city guides, qui
ont été créés en début 2001, y sont
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Notes de bas de page
(17) Michel Mathien, in La presse quotidienne régionale
Que sais-je? éd., Presses universitaires de France, décembre
1993.
DERNIERE MISE A JOUR: 11 juin 2001 Ce document est sans copy right. La seule restriction est de juste citer la source, merci. |